10 décorateurs de 2010
Le magazine AD a invité 10 décorateurs à aménager les pièces de l'étage du beau bâtiment d'Artcurial.
Du chic, du goût, du rare, de l'art, du fric aussi. Genre nouveau classique.
Une visite onirique dans l'appartement rêvé de privilégiés
où se succèdent des atmosphères différentes hantées par des animaux empaillés.
Moi j'ai bien aimé l'exotisme façon Miami 1950 par India Mahadavi,
un entre-jambe chromé et culotté chez François Catroux,
un crâne amidonné chez Chahan Minassian.
Tout ne m'a pas accrochée.
Serait-ce vivable ?
Mark Brown
Pendant le Festival du Lin et de l'Aiguille, j'ai découvert un travail singulier qui m'a scotchée :
Les micro-tissages de Mark Brown, un paysagiste de renom.
"Mark Brown est un paysagiste anglais qui vit et travaille en Normandie. Il crée des jardins sauvages
et spontanés, sans entretien excessif,
sans bêchage et sans arrachage automnal,
dont le charme évolue au fil
des saisons."
Sa "mêlée" est de ces tableaux dont je sais que je ne pourrais jamais me lasser :
Il doit faire environ 15 cm
"Beaucoup d‘entre nous ont connu ces petites étiquettes nominatives brodées
que les mamans cousaient sur les cols de nos vêtements.
Ces petits rectangles de tissu, qui fascinaient Mark Brown,
sont à l’origine d’une œuvre textile singulière qui repose sur un malentendu :
les étiquettes étaient brodées et non tissées somme le laisse entendre
leur désignation anglaise : woven name tapes (to weave = tisser).
Pour reproduire ce format minuscule, l’enfant conçut donc un métier à tisser
à partir d’une boîte d’allumettes, et se mit au travail.
Les pièces présentées au festival sont un assemblage de petites bandes
tissées au format originel, véritable matrice d’une œuvre étonnante
où la patience est mise au service de l’inspiration."
Mark Brown a une importante collection de perce-neiges, celui-ci est passé du jardin au tissage.
En ce moment, Mark Brown travaille la viande.
Ses rouges, ses brillances, ses gras, ses entrelacs.
Un univers* exploré en leur temps par Chardin, Soutine ou bacon. Aujourd'hui par Rochetti.
Le métier à tisser de Mark Brown, c'est cette petite boite bricolée.
Il y glisse des bandes de la photo qu'il a choisie et découpée pour la tisser
puis reconstitue l'image en cousant les bandes de tissage entre elles.
Technique qui crée un léger décalage, à la façon de certains plasticiens
qui juxtaposent des polaroids pour reconstituer une image en jouant de ces mouvements.
Les sujets abordés, le choix de photos pas chics genre catalogue,
les cadrages non conformistes, la volonté de ne pas forcément achever
le tour d'un tableau, et la richesse chromatique de ses compositions :
tout témoigne dans son travail d'une belle intelligence de la chose esthétique.
Le lendemain, Mark Brown est venu voir mon exposition
et j'ai eu le bonheur de constater qu'il l'appréciait.
Nous avons manipulé ensemble "Loup qui dort", simplement, en comprenant.
Une Rencontre.
* et on se souvient au passage qu'on appelle carpaccio les préparations de viande crue
en rappel des rouges particulièrement frappants du peintre Vittore Carpaccio
Au fond du bassin à gauche
La foire
Fiac : foire aux vanités, mais pas seulement.
L'occasion de visiter sans façon une galerie incroyable et de s'y régaler
(entre deux haussements d'épaules).
Quelques unes des merveilles
qui justifient le temps passé dans la file d'attente et le prix terrible du billet.
La plus belle œuvre étant le local, ahurissant de beauté :
l'immmmense palais de verre.
(suivi d'une nocturne au Louvre, c'est autre chose que Porte de Versailles)
"Les désordres du plaisir"
“Regarder ailleurs
Il y a bien des manières d’aborder les œuvres d’art.
Du philosophe au marchand, du critique à l’historien, du conservateur à l’amateur.
Chacun ajuste son regard qui n’exclut pas les autres.
L’ensemble des objets réunis ici est l’effet du hasard.
Ils n’ont d’autre lien que la jouissance de l’amateur et reflètent les désordres du plaisir.
C’est dire le paradoxe d’exposer dans un musée ce qui lui est antagoniste :
les classements de l’histoire sont niés au profit du caprice.
Une institution exemplaire peut-elle accepter
cette bombe à retardement qui bafoue son organisation et menace ses principes ?
L’école buissonnière peut-elle triompher des rigueurs de l’histoire ?
A vous de jouir...”
Daniel Cordier
En passant impromptu au centre Pompidou, je tombe au niveau 4 sur
une exposition formidable : la donation Daniel Cordier.
C’est tout ce que j’aime.
Des objets de la nature et des cultures y conversent,
réunis par le plaisir sensible d’un homme curieux.
Hors fonction, hors savoir, l'objet se laisse découvrir par l’œil surpris et charmé.
Et c’est seulement dans le livret à l’entrée qu’on apprend, si on le souhaite,
que sur le 2e cliché il s’agit d’une plante didactique en résine,
que sur le 4e cliché il s’agit d’un masque d’abattage de chevaux début XXe,
que sur le 6e cliché il s’agit de pierres néolithiques.
Une exposition aussi éclectique que celui qui l’a fomentée, Daniel Cordier lui-même,
88 ans, grand résistant, compagnon de Jean Moulin, historien, marchand d’art
impliqué dès l'origine dans le centre Beaubourg par une importante donation
et... tuteur d’Hervé Vilard.
Il faut se dépêcher car l’exposition se clôt le 23 mars.
A Toulouse, au Musée des Abattoirs, d’autres curiosités de Cordier seront exposées jusqu’au 19 avril.
Et, puisqu’on est au Musée National d'Art Moderne, on monte au 5e
se plonger dans le mur des curiosités d’André Breton
après être passé s’ébahir des formidables sculptures de Giacometti
(qui n’a pas fait que des hommes qui marchent !).
Mais eux sont pensionnaires du musée et on a tout loisir de les visiter paisiblement.